Quentin Spohn 
"Carambolage Au Marché D'Anvers"
Quentin Spohn "Carambolage au marché d'Anvers"

« Carambolage au marché d’Anvers », Quentin Spohn

Le Château, vue d’ensemble

Comme fervente admiratrice l’œuvre de Quentin Spohn je ne pouvais qu’être enchantée par l’exposition que lui réserve aujourd’hui Bertrand Baraudou dans sa galerie Espace A VENDRE et plus particulièrement dans l’immense local qu’il nomme pompeusement Le château qui a le privilège d’offrir à Spohn des murs à la mesure de son dessin tentaculaire, proliférant et  magnifiquement inventif. Un imaginaire qui semble se référer, si j’en crois le titre de l’exposition, à ces marchés de l’art qui fleurirent dès le quinzième siècle en Europe pour culminer à Anvers, au seizième siècle, et furent par le pullulement – le carambolage – des peintures proposées, l’ancêtre des foires d’art contemporain qui prolifèrent aujourd’hui dans notre monde de l’art. L’artiste, qui a fait de la pierre noire son meilleur allié, réalise ici au crayon cette fois, une fresque monumentale et grandiose qui occupe la totalité du  Château.

Quentin Spohn, détail

Passée la première salle de la galerie, réservée à d’excellents dessins de Stéphane Steiner, dans la deuxième, Quentin Spohn a accroché des dessins préliminaires, dont deux pièces abstraites, inattendues par rapport à l’œuvre globale, mais qui permettent de saisir comment est initié cette danse du trait dont la main de l’artiste semble possédée. Sorte de sas d’acclimatation au gigantisme, cet endroit nous prépare à la secousse que nous réserve le crayon fou de Spohn, investissant complètement les murs, sans le moindre espace pour les laisser respirer. Comme eux, nous sommes pris d’assaut, notre œil ne peut échapper à cette accumulation d’images entrelacées, surmultipliées où des visages aux puissantes références picturales, se mélangent en volutes, à des formes oniriques, indéchiffrables pour faire de cette prolifération une œuvre une et unique.

Détail

Comme Aladin frottant sa lampe, Quentin Spohn, fragile et réservé, semble lui-même surpris du pouvoir que lui donne son imaginaire, que sa main, fidèle, suit à la lettre.

Vous trouverez en fin d’article un texte très analytique de l’œuvre de Quentin Spohn ainsi qu’un Curriculum Vitae très professionnellement complet de cet artiste, mais comme je suis plus conteuse que critique d’art, j’aimerais vous raconter comment j’ai fait connaissance avec son œuvre en 2013, à l’exposition des diplômés de la Villa Arson. Les dessins de Quentin accrochés parmi les travaux des autres étudiants très imprégnés ce que leur avaient enseigné leurs professeurs, apparaissaient comme ceux d’un extra terrestre. Comment un tel imaginaire, une telle fraicheur, avaient-ils résisté au tamis très prégnant des professeurs d’Arson, si soucieux de coller à la mode… D’où venait cet oiseau rare qui nous enchantait ? Lorsque le jury dont je faisais partie l’a choisi, de même qu’Alice Guittard comme lauréats du Prix 2013 de la Jeune Création de la Ville de Nice, je me suis dit que je n’étais plus seule à aimer les chemins de traverse. Je n’ai pu que me féliciter de ce choix car leur performance à quatre mains, en 2014, dans la regrettée Galerie de la Marine a eu un grand sucés (lire dans mon ancien blog, mon article : Au Pays des Enchantements).

Cette belle rencontre a vu une suite en 2016, lorsque Luc Clément a mis à disposition de Quentin Spohn, son immense local : Le Dojo pour qu’il y réalise une impressionnante exposition proliférante et titanesque à la mesure de son jeune et immense talent (lire dans mon blog mon article : Une journée particulière.)

« Avec une technique picturale proche de la manière noire en gravure, Quentin Spohn a trouvé à la fois un médium et une méthode. Ses tableaux, souvent de taille monumentale, sont à présent tous réalisés avec cette pierre charbonneuse dont la noirceur légère mais infinie s’accorde si bien à sa vision profondément satirique de la société contemporaine. Revendiquant des héritages susceptibles d’en écraser plus d’un (Nouvelle Objectivité, Ashcan School, Réalisme magique, mais aussi pêle-mêle : Dado, Kudo ou Winsor McCay, et sans doute Ensor et Jim Shaw), Spohn les a assimilés et les régurgite en flots impétueux et libératoires. Dans ses vastes compositions se collisionnent en effet ses propre obsessions et celles d’une société malade de son insatiable appétit morbide, exigeant des satisfactions immédiates et démesurées, soumise à une corne d’abondance incontrôlable qui menacerait d’engloutir la civilisation elle-même. Jérôme Kerviel, Ronald McDonald ou le Taureau rouge (Red Bull) sont les grands maîtres sataniques de ces saynètes grouillantes que des foules compactes de figurants minuscules ou des jungles luxuriantes à la végétation corrompue structurent spasmodiquement comme autant d’organismes en décomposition […] »

Stéphane Corréard  

Un détail

Formé à la Villa Arson, dont il est diplômé depuis 2013, Quentin Spohn enchaine depuis expositions et prix, confortant une pratique singulière, virtuose, fascinante. Triplement récompensé lors du salon Jeune Création en 2017 (lauréat des prix Filaf, Art Collector et Jennifer Flay), il a participé à des expositions à Nice (Villa Cameline, Villa Arson, Galerie de la Marine, etc.), Paris (Espace Niemeyer, galerie Thaddeus Ropac, Bastille Design Center, etc.), Bordeaux ou Marseille. Il a également fait l’objet de plusieurs expositions personnelles à Paris (Premier Regard), Pékin, ou Nice (Le Dojo).

Exposé par le passé à l’Espace A VENDRE lors d’expositions collectives, cette première exposition personnelle marque le début d’une collaboration à long terme qui se prolongera dès le mois de mars avec la présentation de Quentin Spohn (artiste en focus) au Carreau du Temple, à Paris, pour l’incontournable salon du dessin Drawing Now.

De janvier au 4 avril 2020

Espace A VENDRE

10, rue Assalit, 06000 Nicee –

espace-avendre.com

 

Cet article comporte 1 commentaire

  1. Allard Alexandra

    Un vrai plaisir à voir Merci Quentin Spohn… et un vrai plaisir à lire… Merci Lola Gassin

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