De Chagall à Malevitch, La Révolution Des Avant-gardes

De Chagall à Malevitch, la révolution des avant-gardes

De tous les grands vernissages de l’été, De Chagall à Malevitch, la révolution des avant-gardes restera incontestablement The Huge Event de la saison où les plus belles œuvres et les plus belles femmes se seront donné rendez-vous.

En effet, avec des œuvres comme : Le Carré noir/ La Croix noire/ Le Cercle noir, de Kazimir Malevitch, vers 1923, à Introduction au Théâtre juif, 1920, comment peut-on espérer égaler ce qui est là, devant nos yeux, c’est-à-dire le fondement de l’art moderne et contemporain, magnifiquement présenté par celui qui est restera le plus grand commissaire de l’art aujourd’hui : Jean-Louis Prat, l’homme pour lequel j’ai respect et amitié !

Quant aux femmes présentes, la blondeur, les kilomètres de jambes de ces beautés russes tarifées avaient de quoi faire pâlir la petite silhouette cambrée d’une Zahia, star de l’été de la Fondation Maeght !

Pas de doute, l’art, maintenant, ce sont de grandes œuvres, de riches messieurs et, corollaire incontournable, des femmes jeunes, grandes (13 centimètres de talon), blondes ou noires dont la beauté est offerte en prime !

Cessant de me prendre pour l’Elsa Maxwell de la Côte, je vais sérieusement vous parler de cette exposition qui, comme le disent les guides touristiques ainsi qu’un ancien journaliste de Nice-Matin, vaut vraiment le détour…

Première information littéralement tirée du dossier de presse du Grimaldi Forum à Monaco, l’exposition De Chagall à Malevitch, la révolution des avant-gardes réunit des œuvres majeures de grands créateurs qui, entre 1905 et 1930, illustrent les avant-gardes en Russie. Ils ont façonné une modernité sans précédent, se démarquant totalement de ce que l’on connaissait jusqu’alors : Natan Altman, Vladimir Baranov-Rossiné, David Bourliouk, Marc Chagall, Alexandre Chevtchenko, Sofia Dymchits-Tolstaïa, Boris Ender, Xenia Ender, Alexandra Exter, Paviel Filonov, Natalia Gontcharova, Alexej Jawlensky, Vassily Kandinsky, Ivan Klioune, Gustav Klucis, Piotr Konchalovsky, Mikhaïl Larionov, Vladimir Lébédev, Aristarkh Lentoulov, El Lissitzk, Ilia Machkov, Kazimir Malevitch, Paviel Mansourov, Mikhaïl Matiouchine, Alexeï Morgounov, Nadiéjda Oudaltsova, Antoine Pevsner, Lioubov Popova, Jean Pougny, Alexandre Rodtchenko, Olga Rozanova, Guéorgui Stenberg, Vladimir Stenberg, Varvara Stépanova, David Sterenberg, Wladislaw Strzeminski, Vladimir Tatline, Ilia Tchachnik, Guéorgui Yakoulov…

Autre indication d’importance, le commissaire de l’exposition n’est autre, donc, que Jean-Louis Prat, directeur de la Fondation Maeght de 1970 à 2005, et depuis cette date commissaire indépendant auquel on doit des expositions muséales de Miró, Chagall, Léger, etc.

Vous décrire l’exposition n’est pas mon propos, je préfère vous parler des quelques chocs qu’elle a suscités en moi. J’en citerai trois d’ordres différents, mais ceci est tout à fait personnel car je n’ai pas visité tous les grands musées du monde et ne suis jamais allée, hélas, en Russie…Plutôt que de donner une explication maladroite pour justifier l’importance de cet événement, je préfère laisser la parole au commissaire sur ce qui l’a conduit à ces choix pour l’exposition : « Ce qui la rend originale c’est la présence de tous les artistes qui ont vécu cette époque dense et tragique, et la sensation de vivre, sans cesse, grâce à eux dans la découverte. Ils sont tous opposés et opposables. Le titre de l’exposition marque la confrontation de deux artistes majeurs du XXème siècle : Chagall et Malevitch. Ils ont vécu le même temps, dans des langages riches et contradictoires. La tolérance est dans cette ouverture sans fin que tous les artistes proposent. Hommes ou femmes, et elles seront nombreuses, à égalité, donnent la sensation de vivre une époque nouvelle. L’exposition couvre vingt-cinq années de création, de 1905 à 1930. Je suis parti de 1905 avec l’idée que, brutalement, avec la première révolte de la population à Saint-Pétersbourg, tout changeait de camp. L’Empire est déjà finissant et les artistes depuis plusieurs années ressentent ce besoin de dire les choses différemment. Je termine l’exposition en 1930, année du suicide de Maïakovski, le poète de toutes les avant-gardes. »

Le premier fut donc de voir « en chair », alors qu’il s’agit justement du contraire de ce que la peinture avait montré jusqu’alors, le « Quadrangle », la « Croix » et le « Cercle » de Malevitch ! Habitué aujourd’hui à ce langage conceptuel auquel plus d’un a encore du mal à s’accommoder, d’autant plus que d’innombrables remakes en affaiblissent le propos, on est néanmoins sidéré par la radicalité de ces trois œuvres qui, ne l’oublions pas, datent de 1923 environ.

Autre stupéfaction, les sept grands panneaux qui occupent la salle du Théâtre d’art juif de Marc Chagall. Pourquoi une telle surprise alors que je suis habituellement peu touchée par les grandes allégories de Chagall ? Parce que Chagall, avec ces peintures épurées sur des fonds presque blancs, nous donne, contrairement à la surcharge de couleurs à laquelle il nous a habitués par la suite, une admirable leçon de peinture…

Enfin, et ceci semble venir en contradiction avec les superlatifs que j’ai employés jusque ici, on découvre des œuvres moins emblématiques, plus intimistes, on pourrait presque dire des croûtes que Jean-Louis Prat ne renie pas, faisant remarquer qu’au-delà des grands musées de l’Etat russe, les musées de province et des collectionneurs privés ont prêté des œuvres pour donner à cette épopée une image révolutionnairement créatrice, mais aussi à l’écoute des mouvements européens florissant comme le fauvisme, le cubisme, le futurisme… que certains artistes russes découvrent chez les grands collectionneurs du pays ou dans leurs voyages, et qui les inspirent.

Dernier point intéressant de cette exposition, sa scénographie qui a demandé à Jean-Louis

Prat de jouer avec la nudité des 4 000 m2 de l’espace Ravel du Grimaldi Forum, pour construire autour de la grande Tour de Tatline, une croix dont chaque branche accueille un des mouvements des avant-gardes : Suprématisme, Constructivisme/Suprématisme, Abstraction, Constructivisme. Sept autres salles disposées en étoile reçoivent, elles aussi, les étapes incontournables de cette période de création foisonnante.

Je cède une fois encore la parole à Jean-Louis Prat : « J’ai compris qu’il me fallait dominer le lieu, le construire, pour mieux expliquer et accompagner en quelque sorte la démarche artistique et scientifique qui m’a guidé », indique-t-il avant de révéler son idée conductrice, largement inspirée de l’œuvre de Malevitch lui-même : « Le carré, le rond et la croix sur fond blanc de l’artiste résument le choc visuel et esthétique de cette exposition. J’ai donc développé le concept global de la scénographie avec cette approche d’une organisation rigoureuse et géométrique si révélatrice de la production artistique de l’avant-garde. (…) ».

Jusqu’au 6 septembre 2015

Grimaldi Forum

10, avenue Princesse Grace – 98000 Monaco

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