Édito de mai
Même si ce mois de mai a été riche en événements de toutes sortes, c’est pourtant du local – je ne sais plus qui disait : le local, c’est l’universel moins les murs – dont j’ai envie de vous parler.
J’évoquerai d’abord cette tradition populaire niçoise, dite millénaire, de Tourner le Mai, Anen vira lou Mai, qui consiste, ou consistait – car ils sont peu nombreux les Niçois qui s’en souviennent aujourd’hui – à monter à Cimiez* quand les beaux jours arrivent pour célébrer le printemps. Là, nous dit l’histoire : « Pendant que les enfants, tout au long de la journée, courent partout dans les jardins, les familles et les amis s’installent sous les arbres, par affinités, discutant de tout et de rien, heureux de se retrouver après un hiver passé chacun chez soi, en buvant un gotou de vin* et en mangeant la socca*, la pissaladièra*et lou Pan Bagnat*. Pendant que les uns et les autres sont occupés à ficanasser* ou à faire un penec*, des groupes de musique ou de danse traditionnels animent l’estrade située autour du mat enrubanné. » C’est ça, tourner le Mai, danser autour d’un mat, en croisant, puis décroisant dans le sens opposé, les longs rubans de couleur qui l’entourent. Joli, non ?
Ensuite, puisque de fête il est question, j’ai voulu élargir le périmètre et en savoir un peu plus sur cette Fête des Mères, qu’enfants et adultes heureux d’en avoir une, ont souhaité à leur génitrice en ce dernier dimanche du moi de mai…
Eh bien, cet événement qui engendre aujourd’hui une riche manne publicitaire est, n’en déplaise aux vertueux censeurs, bel et bien une tradition plurimillénaire. Grecs et Romains célébraient chaque printemps Rhéa ou Cybèle, mère de Zeus et plus globalement de toute la clique des dieux de l’Olympe, une occasion aussi de fêter la fertilité. Ensuite, au cours du temps et dans l’histoire, cette fête prend divers aspects, mais toujours avec la maternité comme axe principal. En 1806, dit-on, Napoléon (toujours lui) instaure une Fête des mères, mais cent ans plus tard, en 1906, le village d’Artas (Isère) organise une cérémonie en l’honneur des mères de familles nombreuses. Le village continue aujourd’hui à revendiquer la création de la Fête des mères en France, réfutant l’idée d’un événement dû au maréchal Pétain qui, cependant, donna un ton plus solennel à l’événement, notamment dans son message à la radio (je vous en dispense), toujours dans l’idée de tout mettre en œuvre pour relancer le taux de natalité en France. En 1950, la politique nataliste étant toujours de rigueur, la loi du 24 mai indique que : « la République française rend officiellement hommage chaque année aux mères françaises au cours d’une journée consacrée à la célébration de la Fête des mères ». Elle fixe la date au quatrième dimanche de mai.
En revanche, dans une majorité d’autres pays se calant sans doute sur les dates du fameux Mother’s Day américain (dont je vous exonère de l’histoire), comme le Canada, l’Allemagne, la Nouvelle-Zélande, le Brésil, l’Australie, etc, la Fête des mères a lieu le deuxième dimanche de mai. A noter, juste pour rire, que la Belgique fête aussi les mères le deuxième dimanche de mai, sauf la ville d’Anvers, qui, elle, les célèbre le 15 août !
* merenda : casse croûte
*gotou de vin : verre de vin
*socca : spécialité culinaire du Comté de Nice (crêpe de farine de poids chiches)
*pissaladièra : spécialité culinaire du Comté de Nice ( tarte aux oignons et au pissala : anchois écrasés)
*pan-bagnat : spécialité culinaire du Comté de Nice (littéralement: pain trempé…salade niçoise dans un pain rond)
*ficanasser : bavasser, déblatérer
*penec : sieste (sport traditionnel de la culture niçoise)