Édito de septembre
Encore une fois, je suis en retard pour mon édito, mais septembre a été si calme après le drame que Nice a vécu et qui laisse bien des séquelles sur les corps et dans nos âmes, que dans cette quiétude retrouvée, je n’ai pas vu le temps s’écouler, bercée par la torpeur d’un été tardivement chaud sous ce ciel toujours si magnifiquement bleu chez nous en septembre.
Voilà que je dis chez nous comme si je parlais de mon village, mais c’est ainsi que je pense ma ville, les pieds bien ancrés dans son sol, plus encore après les souffrances qu’elle a subies. Tous les jours, ou presque, je regarde cette Promenade que je ne vois plus de mes fenêtres, comme jadis quand j’étais enfant, mais qui m’apparaît toujours comme la plus belle baie du monde, ainsi que la décrivait mon père, revenant de ses innombrables voyages…
Au sujet de Nice et de ses lieux, j’avais exploré dans mon blog mon quartier, qu’on appelle celui des Musiciens à cause des noms de ses rues, et je vous avais promis une suite… Promesse non tenue pour l’instant, mais en me remémorant la vue de mes fenêtres, je vous raconterai certainement sous peu le Port et aussi le Mont-Boron, la colline qui le domine… Recoins et anecdotes s’empilent dans ma mémoire et au-delà de lieux sympathiques, marchés, restaurants et boutiques que je vous inviterai à visiter, c’est du passé, sans doute, que j’aurai envie de vous parler.
Je lis en ce moment « Livre pour adultes »*, un bouquin de Benoît Duteurtre, ouvrage un peu austère quant au ton et à certains sujets abordés, mais qui, outre son humour et ses qualités littéraires, a le privilège de faire vivre pour nous ces petites fermes des Vosges avant la totale extinction d’un monde rural français…
II y a, dans le triste fait de vieillir, deux aspects qu’on ne pourrait pas appeler avantages, celui d’avoir connu ce que d’autres ignorent et de pouvoir le leur transmettre et celui, beaucoup plus égoïste et bien plus redoutable, de dire ce que l’on pense sans barrière et avec sévérité, pour ne pas dire avec parfois un brin de méchanceté… A ce sujet, avec une amie, nous revenait en mémoire sans pouvoir la citer littéralement, une réflexion de Nietzsche, d’une injustice flagrante, disant que, comparé à Wagner, il y avait chez Brahms beaucoup de notes inutiles… Ce mot m’en rappelle un autre, de Georges Lautner cette fois : comme il me demandait des nouvelles d’une parente, je lui répliquai qu’elle avait épousé un jeune critique d’art, et Georges de s’écrier : « Comment peut-on être jeune et critique ! »
*Benoît Duteurtre, Livre pour adultes, Gallimard