Huang Yong Ping, L'Arc De Saint-Gilles, 2015 © ADAGP Huang Yong Ping And Kamel Mennour, Paris. Photo Julie Joubert.
Huang Yong Ping, L'Arc de Saint-Gilles, 2015 © ADAGP Huang Yong Ping and Kamel Mennour, Paris. Photo Julie Joubert.

FIAC & Co

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Sean Landers, Marroons Bells 2015, Capitain Petzel

Trois ans sans FIAC*, quatre ans sans Miami Beach, cinq ans sans Bâle… Peut-on vivre sans les Foires ? Oui, très bien, simplement la remise en route est un peu difficile !
Pourquoi une aussi longue absence alors que je n’ai quitté ni l’art ni les artistes ?
Par une sorte de ras-le-bol de ce monde trépidant des marchés où la hauteur des prix vous donne le vertige, où les galeries changent peu, mais les artistes beaucoup, où les petits deviennent grands ou alors disparaissent, où enfin, vous vous sentez étranger à cette foule qui regarde sans voir, qui achète sans compter, qui croit sans réfléchir, qui convoite sans aimer…
Pourquoi y aller, me direz-vous alors ? Parce que c’est une bonne prise de température et que si le malade a la fièvre, c’est tout de même intéressant de la diagnostiquer !
Après huit jours à Paris pendant la FIAC, est-on plus connaisseur en art ? Non ; plus informé ? Oui, un peu ; plus riche ? Oui, si on est déjà riche ; plus heureux ? Oui parfois, quand une œuvre que vous avez achetée vous donne du plaisir, vous fait réfléchir, vous fait rêver… Alors plutôt que d’analyser les courants, les modes, les valeurs qui montent, le nouveau, comme dirait Ben, je vous propose une petite promenade dans les allées d’Officielle et de la FIAC où j’ai pris parfois beaucoup de plaisir à voir des œuvres, des artistes (peu) et des gens… car les foires, c’est aussi voir des gens, parler d’art avec eux, avec les galeristes, ou d’argent (c’est selon), rencontrer des copains ou des célébrités à la mémoire desquels on a parfois la coquetterie de se rappeler, des moments riches finalement en expériences humaines, allez, disons-le, de bons moments !

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Fabrice Samyn, Untitled, from the series Unfirable fire. Meessen de Clercq

Prenons le parcours par le commencement c’est-à-dire l’inauguration d’Officielle dont Jennifer Flay, sa directrice, dit « En lançant Officielle, la FIAC apporte une réponse sur mesure aux changements territoriaux et démographiques de l’univers des galeries d’art : une plate-forme d’expositions conçue pour une nouvelle génération. (…)». En effet pour cette deuxième session (je n’ai pas vu la première) ce que j’ai découvert de nouveau c’est avant tout les galeries… Sur les soixante-neuf participants, je n’en connaissais qu’une dizaine (mais je vous l’ai dit, je ne suis pas une référence).

Mardi 20 octobre. J’ai beaucoup aimé Officielle cette petite (par la taille) foire. Je m’y suis rendue à peine descendue de l’avion, avec une curiosité toute neuve (voir plus haut, ma désertion des foires) d’abord pour le bâtiment qui abrite cette élégante Cité de la mode et du design, en bordure de Seine, dans le XIIIème, mais surtout pour son contenu, mis intelligemment en espace de façon à ce que la lecture des œuvres soit claire, facile, attrayante…
Comment procéder pour commencer la visite ? Pourquoi pas par des galeries que je connais ? Chez Bernard Ceysson, Saint-Étienne : tiens, des Louis Cane, ai-je dit à mon compagnon de parcours… Et ça se vend bien, m’a répondu l’assistant qui venait d’en décrocher un ! Chez Kromus+Zink, Berlin, la joie de voir un brillant oneman show de Grégory Forstner (lire son portrait dans mon blog) ; un solo show aussi des bronzes de Michel de Broin chez Eva Meyer, Paris ; une belle toile de Damien Deroubaix chez Nosbaum Reding, Luxembourg ; une œuvre d’Amélie Bertrand chez Semiose, Paris. Une surprise, retrouver Houg que j’avais connu à Lyon, installé maintenant à Paris et une découverte, Selma Feriani de Sidi Bou Said, qui marque cette première présence tunisienne d’un beau stand avec une installation de Maha Malluh. Dernier plaisir, celui de découvrir les bois de Fabrice Samyn chez Meessen de Clercq, Bruxelles.

Passons aux coups de cœur maintenant…

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Caroline McCarthy, Picnic, Green on Red, Dublin

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Lu Pingyuan, Madein Gallery, Shanghai

Chez Green on Red, Dublin, les irrésistibles petits formats de Caroline McCarthy, un subtil travail de bandes d’acrylique pour des constructions géométriques ou encore ses Matchboxes, petites huiles sur toile, de mêmes dimensions que les originaux, mais qui mises au mur, résonnent comme de grandes toiles… Deuxième découverte et une commande en ce qui me concerne, car tout était déjà vendu, Lu Pingyuan, un jeune Chinois travaillant et vivant à Shanghai, présenté par Madein Gallery. Le propos de l’artiste m’a ravie, tant son ingéniosité oscille entre se foutre de la gueule du chaland et le moyen de faire admettre un remake réussi d’un artiste très connu et mort, bien entendu ! Lu Pingyuan raconte qu’On Kawara lui a rendu visite dans son sommeil pour lui demander de continuer son œuvre, d’où ces petites toiles absolument identiques à celles de l’artiste, quant au format, au support, aux caractères…Seule la date change, évidemment !

Michel Blazy

Michel Blazy

Mercredi 21. Ouverture de la FIAC aux collectionneurs, avant le vernissage de l’après-midi. Consciente de mon agoraphobie récente, je m’y suis rendue à midi pile, mais pour trouver déjà les allées remplies de visiteurs !
J’ai choisi de faire le parcours des galeries du rez-de-chaussée du Grand Palais, stand par stand. Une belle FIAC vraiment ! Était-elle ainsi les précédentes années ou bien s’est-elle améliorée ?
Ma première station a été pour Art Concept, Paris, avec un intérêt particulier pour les pièces murales de Michel Blazy. Puis, sans hiérarchie aucune, ni de prix, ni de ligne, comment ne pas tomber sous le charme de ce grand cerf de Sean Landers (image en début d’article), peint au poil près, sur fond d’impression écossaise, Petzel Gallery, Berlin ? Décoratif me direz-vous, mais j’achète, ou plutôt j’aurais aimé acheter ! Continuer ensuite à déambuler pour s’arrêter sur le stand de Nicolai Wallner, Copenhague, pour admirer une sculpture de Jose Dávila. Être surprise de découvrir les bâtons d’ André Cadere chez Hervé Bize, Nancy, ces barres de bois rond, introuvables, donc inachetables, témoignage de l’insertion de cet artiste dans l’histoire de l’art par sa stratégie du déplacement … Des animaux encore, ceux de Huang Yong Pin, tronçonnés, enrichis d’inclusions de feuilles d’or chez Kamel Mennour, Paris ; les singes de N.S. Harsha chez Victoria Miro. Chez Mehdi Chouakri, des toiles de maître cette fois, mais aux visages oblitérés de peinture blanche, farce conceptuelle de l’Allemand Hans-Peter Feldmann…

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Farah Atassi, Still Life in Red Interior, 2015 © Farah Atassi. Courtesy Galerie Xippas.

Pae White, Clarificxation, 2015. Cotton, polyester and Trevira 275 × 275 cm courtesy: Pae White Studio, Los Angeles, kaufmann repetto, Milan / New York. Photo: Andrea Rossetti

Pae White, Clarification, 2015. Courtesy: Pae White Studio, Los Angeles, Kaufmann Repetto, Milan / New York. Photo: Andrea Rossetti

Et pour finir sur une note non figurative, les immenses peintures abstraites de Katarina Grosse, chez Nächst St. Stephan Rosemarie Schwarzwälder, Vienne et une magnifique toile de Farah Atassi, un désir d’achat que je n’ai hélas pu assouvir chez Xippas, Paris, Genève, Montevideo, Punta del Este !

Jeudi 22, une montée des marches du Grand Palais pour découvrir les espaces sous la voûte, accompagnée cette fois d’un expert en nouveautés, peut-être par crainte d’être dépassée par le côté abrupt des propos ? Ou de leur vacuité ? Rien de tel pourtant dans le Salon d’Honneur, où deux artistes ont retenu notre attention, Oliver Osborne chez Catherine Bastide, Bruxelles et Pae White chez Kaufman Repetto. Des toiles unissant des images de dessins animés à de purs monochromes pour Osborne, d’étonnantes tapisseries comme voilées de fumée pour Pae White… Magnifique !

Si je ne me suis que brièvement arrêtée dans les secteurs Est, Ouest, Lafayette du Grand Palais, c’est que je ne suis pas toujours en adéquation avec ce que les responsables artistiques de notre pays appellent les artistes émergents car, loin de mettre en doute la valeur de leurs recherches, je pense qu’ils oublient trop souvent le dialogue qui devrait s’instaurer entre eux et les collectionneurs dans un lieu comme la FIAC. Cette volonté d’une programmation prospective comme unique critère de choix pour les artistes des galeries retenues, répond davantage à des expositions pour Centres d’art qu’à celles d’un marché comme la FIAC. De cetet erreur de cible, découle, me semble-t-il et c’est regrettable, une plus grande attirance des acheteurs pour des artistes exposés par des galeries d’autres pays.

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Melik Ohanian et Gilles Fuchs (Président de l’ADIAF), Photo Cédrick Eymenier.

Samedi 24, la remise du Prix Marcel Duchamp 2015

L’opinion exprimée ci-dessus aurait dû me détourner du Prix Duchamp, or c’est tout le contraire, et pour plusieurs raisons : d’abord parce que ce Prix est un hommage à Marcel Duchamp, prince du ready-made, qualifié par André Breton d’«homme le plus intelligent du siècle », et qu’il vaut mieux se référer à l’original plutôt qu’à ses copies… Puis parce que l’exposition de Davide Balula, Neïl Beiloufa, Melik Ohanian et Zineb Zedira est présentée dans un seul espace ouvert, sans cimaises séparatrices, ce qui leur permet de dialoguer entre elles et avec le public, sans retour mercantile… C’est aussi parce que j’ai trouvé que le jury avait fait un excellent choix en la personne de Melik Ohanian comme lauréat du Prix Marcel Duchamp 2015, et c’est enfin parce que l’ADIAF (Association pour la Diffusion Internationale de l’Art Français) créée en 2000 et animée par des collectionneurs privés le décerne et que j’en suis membre depuis cette année.

Hélène Jourdan-Gassin

*FIAC (Foire Internationale d’Art Contemporain )

Note : La FIAC ne m’ayant communiqué aucune photographie ni information malgré mes demandes répétées, je remercie vivement les galeries d’avoir aimablement répondu à mes messages en m’envoyant les images requises.

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